Derniers mois - - 96e RI - 2e Bat. - Ernest Olivié - Grande Guerre 14-18

Aller au contenu

Menu principal :

Derniers mois - - 96e RI - 2e Bat.

1918

Page précédente : Alsace #3.

Résumé des évènements dans la période sans carnet
( Extraits de renseignements pris sur Internet, que nous n’avons pas encore pu vérifier ).


Le 96e R.I. reste en Alsace durant tout le premier trimestre 1918. Le 31 mars 1918, le 96e R.I. embarque à Champagney, près de Belfort. Il part pour contrer la grande offensive allemande au point de jonction des armées française et anglaise, vers Compiègne.


Le 96e R.I. vient de quitter le calme relatif de l'Alsace pour une plongée en enfer, à l'autre extrémité du Front Occidental.

Le 1er avril 1918, le 96 e R.I. débarque à Estrées-Saint-Denis ( Oise). Puis le 96e R.I. remonte vers le Nord, suivant les armées ennemies qui se replient sur les Monts des Flandres méridionales.


Lettre d’Henri Grialou à Jean-Antoine Estéveny.
      
4 avril 1918

Nous sommes toujours dans le même secteur. Depuis le début de l'offensive nous sommes on ne peut plus tranquilles. Tu as dû apprendre qu'Olivié est parti dans la fournaise avec Poujol probablement. (…) Comme toujours, advienne que pourra à la garde de Dieu.


Le 13 avril 1918, le 96e R.I. quitte Liancourt sur des camions et s’arrête avant la Ligne des Monts des Flandres.



Lettre écrite par Ernest Olivié à sa mère et sa sœur Clémence, quelques jours avant sa mort.


+ Ce 17 avril 1918
Bien chère Maman, ma chère Clémence,

Encore un petit mot aujourd'hui, puisque j'en ai le temps. Il faut en profiter en attendant les jours où nous serons moins libres.

Rien de nouveau à vous annoncer. Ma santé est toujours excellente et je désire vivement qu'il en soit de même pour vous, malgré tous vos chagrins que vous vous faites, mal à propos. Marius s'est encore très bien tiré d'affaire : il va sans doute aller dans un secteur tranquille, à présent. Moi je suis encore un peu en arrière et vous pouvez avoir la ferme confiance, comme moi, que Dieu me gardera encore cette fois, s'il faut y aller.

On a le grand tort de gémir sans raison. Nous savons, c'est l'Evangile qui le dit, que pas un cheveu ne tombera de notre tête sans la permission de Dieu. S'il lui plaisait de nous enlever même la vie, nous savons que c'est encore pour notre bien ou pour celui des autres. Courage donc toujours et espoir en Dieu ! Quand vous verrez M. le Curé de Glassac, dites-lui que j'ai définitivement acquitté les messes qu'il m'avait réservées. Il me doit 30 f d'honoraires : vous pouvez les prendre et vous en servir. Je le lui dirai, du reste.
Le temps est toujours couvert et triste. J'ai reçu encore ces jours-ci une lettre et un colis de Tante : tout le monde va bien à Toulouse.
Je vous embrasse bien affectueusement.

Ernest.

Lettre d'un ami, probablement de Gabriel Estivals, encore en soins près de Bordeaux.

19-4-18

Mon cher ami,

Je réponds immédiatement à ta lettre pour que tu puisses dire des messes à 5 fr dès maintenant à mon intention. Tu m'écriras pour un chiffre donné, lorsque par exemple tu seras arrivé à 10 ou 20 et je t'expédierai le montant.
 Enchanté de te savoir bien pendant quelques jours. Le Bon Dieu te ménage un peu de répit pour que tu puisses te retremper et je suis sûr que tu en profites. Je craignais en effet que vous fussiez fortement engagés. Il y aura peut-être de vilains jours encore. Que le bon Dieu te conserve à la France de demain !
 Pascal, Labadie, les brancardiers du 122 e faits prisonniers à Lunéville seront bien plus tranquilles que dans nos pauvres sections d'infanterie, et aussi moins au danger. J'en suis heureux pour eux. Dis-leur bien des choses de ma part.
 Je trouve le moyen de beaucoup m'ennuyer ici. Impossible, ayant un méd.-chef franc-maçon de faire du bien par l'organisation du service religieux. Pratiquement, pas de messe, pour un hôpital de 600 blessés. C'est stupide. Mais la liberté de conscience sous notre régime n'est qu'un vain mot. Plus on parle de liberté, moins il y en a. Cela m’écœure. Et dire qu'on se fait tuer pour ... la Liberté.
 Je dois être présenté au Méd.Chef mardi, j'espère qu'il prendra une décision. Mes frères vont bien. Clément seul est dans la Somme.
 Nous recevons ici un peu toutes sortes de misères humaines. Le service de l'urologie, et celui des pré-tuberculeux ont pris une large extension. Il y a toute une jeunesse empoisonnée aux sources de la vie. Ce n'est pas étonnant. Avant-hier, sur un grand Cours, j'ai été arrêté à trois ou 4 reprises. Bordeaux, comme Lyon, achève de se pourrir. Triste guerre. "A peste, fame et bello, libera nos, Domine".
 Qu'ont fait les Alliés en mars 1917 de la lettre du pacifiste empereur ???
Ah ! nous en avons du nez dans nos diplomaties démocratiques, pour saisir au vol les bonnes occasions. On ne manquera pas maintenant de bourrer une fois de plus le crâne à l'opinion, mais ce qui est écrit, reste. Tout cela, mon bon ami, se passe avec du sang, sans quoi on s'en désintéresserait. Mais c'est difficile, étant donné les conséquences effroyables des régimes anarchiquement organisés.
 Je te quitte car le facteur va partir et je ne voudrais pas retarder ta lettre.
En union de prières.

Pas de signature.



Le 29 avril 1918 à midi,  le 96 e R.I. reçoit l’ordre de « contre-attaquer l’ennemi qui a pris pied sur les pentes des Monts Rouge et Vidaigne ».

Le jour-même à 11 h du matin, Ernest Olivié rédige son
testament temporel écrit sur son carnet de relevé de messes. Nous sommes à  l'avant-veille de sa mort. Avait-il un pressentiment ?...

"Au dire des combattants qui les ont vécues, ces journées comptent parmi les plus terribles de la Grande Guerre. "

Extrait de l’historique officiel du 96 e R.I..
Les jours de repos passés a Ramersmatt, Sentheim, Soppe, les visites  à T hann,  Ma ssevaux, les excursions du Rossberg, celle du lac de Sewen dans la vallée de la Doller, les tonalités ravissantes des grands bois de sapins, semés de taches claires ou dorées, resteront pour nous un des plus agréables souvenirs de la guerre.
Après quelques semaines de repos  à  Giromagny, le Régiment embarque le 31 mars à Champagney, près de Belfort.
Bataille des Monts de Flandre (29 avril – 15 mai 1918). Depuis dix jours, la grande offensive ennemie de printemps est déclenchée. Les Allemands, débarrassés  du  théâtre oriental par la défection russe, ont rassemblé une masse de divisions solidement entraînées pendant l'hiver et les lancent furieusement à l'attaque au point de jonction des armées françaises et britanniques, en direction de Compiègne.
Ils espèrent un succès décisif et la presse d'Outre-Rhin affirme à grand fracas que rien ne saurait arrêter les soldats d'Hindenburg, ni sauver  la  France  du désastre.
Le  1 er avril, le  96 e  débarqué à Estrées-Saint-Denis (Oise), fait partie du GAR, (groupe d'armées de réserve). Après un succès important sur la droite des armées anglaises (Ve Armée), la poussée allemande, endiguée, puis maîtrisée, se transporte plus au nord et s'exerce en direction d'Amiens, même échec. Nouvel effort vers Bailleul, sans plus de résultat. Le 96 e a suivi parallèlement au front le déplacement des masses ennemies qui paraissent gagner la Flandre méridionale.
Le 13 avril, le Régiment quitte Liancourt, traverse au milieu d'un flot de camions Beauvais, Amiens, Fruges, Arques, et débarque, non loin de Cassel, en arrière de la ligne, des Monts, à l'assaut desquels se ruent les hordes du grand duc Albert.
La situation est grave ; le mont Kemmel, sentinelle avancée, de la ligne des Monts (Mont Sharpenberg, Mont Rouge, Mont Vidaigne, Mont Noir, Mont des Cats), perdu le 25 avril, devient pour l'ennemi un observatoire précieux.
Arrivé le 28, alerté le 29 au matin, le 96 e reçoit à midi l'ordre de « contre-attaquer l'ennemi qui a pris pied sur les pentes des Monts Rouge et Vidaigne », Au cours de la marche d'approche, l'ordre d'attaque est remplacé par un ordre de relève pour la nuit suivante, prescrivant de « profiter de l'opération pour élargir le front ».
Arrivés à minuit sur un terrain complètement inconnu, dépourvu de toute organisation et dont les défenseurs ont été à peu prés anéantis, les  1 er  et  2 e  Bataillons (commandants Clavet et Latil) attaquent droit devant eux à 2 heures. Grâce à l'exemple magnifique des chefs et à l'ardeur de leurs hommes, la route Bailleul Locre est dépassée.
La compagnie Haon enlève de haute lutte trois mitrailleuses et capture 20 prisonniers, le soldat Maurette, abordé par un groupe de quatre Allemands, en tue un et force les  trois  autres à rejoindre nos lignes. Au cours de ces combats acharnés, se distinguent particulièrement le sous-lieutenant Huchard, le lieutenant Dufour, le sergent Olivier.
Malgré trois attaques successives conduites avec le même entrain, sous un pilonnage indescriptible, le bois Long ne peut être atteint et les pertes sont particulièrement lourdes.
La plupart des officiers sont hors de combat (capitaine Lesseur, lieutenant Dufour, capitaine Vigneron (blessés) ; lieutenant Girardel (tué) ; lieutenant Régnier (tué) ; lieutenant Peyre, capitaine Haon, lieutenant Thibault (blessés) ; Desprès (tué).
Au dire des combattants qui les ont vécues, ces journées comptent parmi les plus terribles de la Grande Guerre,






 
Retourner au contenu | Retourner au menu