Décès du père d'Ernest : Jean-Baptiste Olivié. - Ernest Olivié - Grande Guerre 14-18

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Décès du père d'Ernest : Jean-Baptiste Olivié.

1916 > Front de l'Aisne

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Dimanche 6 et lundi 7 février 1916 -

Ste Messe pour le repos de l’âme de notre cher Papa. A 10 h je prends le train des permissionnaires à Damery. Affreux contraste ! Mes camarades volant vers leurs familles, savourant d’avance la satisfaction de vivre quelques jours heureux ;

et moi, je suis bien triste, je vais vivre des jours de douleur et de larmes ! Cette pensée me fait verser des pleurs que je m’efforce de contenir pour ne pas troubler la joie si légitime des camarades. Arrivée à Paris à 14 h. Deux heures de liberté. Visite à Notre Dame, voyage en métro et en train, mais peu de charmes pour moi, car toute cette vie exubérante, lascive, contraste par trop avec la tristesse de mon cœur blessé dans ses fibres les plus tendres. Départ à 16 h, voyage interminable jusqu’à Orléans. Je suis avide de connaître des détails intéressants sur la mort de notre cher Papa. A-t-il pu recevoir les derniers sacrements, a-t-il eu au moins quelqu’un de ses fils pour l’accompagner à sa dernière demeure, quelles ont été ses dernières paroles, etc. etc. ?

La lenteur du train m’exaspère. D’Orléans à Capdenac ça va plus vite. Arrivée à Capdenac à 12 h (le 7 février). Je ne vais point voir ma sœur Louise, pensant qu’elle doit se trouver à la maison.
Enfin à 15 h j’arrive à Auzits.

En un bond je suis à la maison où je trouve toute la famille, bien incomplète hélas ! récitant les grâces après le repas. Mon premier baiser pour ma pauvre maman : nos larmes se mêlent et notre gorge se resserre ; je ne la trouve pas cependant trop abattue. Le Bon Dieu lui a donné la force de supporter avec résignation l’affreux malheur qui l’a frappée. Ma tante ( il s'agit très probablement de la soeur de Jean-Baptiste, Eugénie Olivié, qui habite à Toulouse. Elle apparaîtra souvent dans la suite du récit. Ernest et elle sont très proches ) se disposait à repartir, je la retiens jusqu’au lendemain au soir. Le service de neuvaine a été fait ce matin à cause de ce départ. J’en suis peiné, car je croyais arriver à temps au moins pour cela. Mais je me console à la pensée que je pourrai néanmoins offrir le St Sacrifice tous les jours pour le repos de l’âme de mon cher Papa. Mon frère Baptiste a pu arriver à temps pour assister aux obsèques. Cela me cause un peu de joie : les combattants ont pu être représentés auprès du cercueil de Papa.
Au moment où j’arrive à 15 h 30, plusieurs parents, entre autres ma tante, se disposent à repartir pour la gare pour prendre le train de 17 h. Mon arrivée détermine ma chère tante à retarder son départ jusqu’au lendemain au soir.
La chère Maman me donne des détails sur les derniers moments de notre cher Papa, cela m’intéresse vivement, malgré la tristesse que nous cause à tous ce récit. Le pauvre Papa s’est endormi sans une secousse, mais aussi sans aucune parole ; du moins il a pu recevoir à temps, avec toute sa lucidité d’esprit, les sacrements des mourants : confession et extrême-onction à 4 h du matin. Mais à cause de ses vomissements, le curé n’a pas jugé à propos de lui donner le St Viatique. A 9 h, il n’était plus. Le plus triste c’est que Maman se trouvait absolument seule, Clémence s'étant absentée pendant quelques instants.

Mardi 8 février 1916 -

Ste Messe à Testet pour le repos de l’âme de notre cher Papa : Maman, tante et ma sœur Marie y assistent. Journée pluvieuse, chute de neige. A 5 h du soir, départ de tante que je vais accompagner à la gare. Mon frère Baptiste regagne aussi l’école des chemins de fer dans la Seine-et-Oise.

- Mercredi  9 février 1916 -

Ste Messe. Journée calme. Rien à signaler.


- Jeudi 10 et vendredi 11 février 1916 -

Rien de spécial à noter. Nous recevons à 16 h une lettre de Marius et d’Eugénie ( Eugénie Fournil est une soeur d'Ernest ; elle habite à Toulouse; elle est la maman de Denise et d'Anne-Marie la filleule d'Ernest ). Le premier nous annonce son arrivée pour le 12. Eugénie dit à ma sœur Marie qu’elle peut attendre jusqu’au dimanche à rentrer. Elle devait partir le 11, elle attendra au 13.

- Samedi 12 février 1916 -

Je descends à Capdenac pour attendre Marius et rassurer ma sœur Louise qui aurait pu se préoccuper de ne pas voir arriver Marie. Ste Messe à l’église de Capdenac. Malheureusement Marius n’arrive pas et je dois rentrer bredouille à la maison.

- Dimanche 13 février 1916 -

Messe de communion à Glassac. Vêpres à Testet. Ma sœur Louise se prépare à partir. Nous attendons Marius qui n’arrive malheureusement pas. Nous en sommes peinés car Marie va s’en aller sans pouvoir le voir.

- Lundi 14 février 1916 -

Ste Messe à Testet. Vente de 2 taureaux à Decazeville. Marius arrive à 15 h. Je pourrai rester avec lui jusqu’à demain au soir. Nous nous racontons nos impressions de guerre.

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Mardi 15 et mercredi 16 février 1916 –

Ste Messe à laquelle vient assister Marius. Visite à Tols (maison de la famille de Baptiste). Marius se met à l’œuvre pour faire une croix pour la tombe de notre cher père ( Marius était menuisier ). Préparatifs de départ, triste séparation. Je suis heureux que Marius reste encore 8 jours après moi, parce que la situation de notre chère Maman est bien triste : se voir seule, après une si nombreuse famille, c’est bien pénible. Heureusement que

Clémence (mère de René Foulquier) va bientôt lui servir de compagne.

A 17 h, je quitte le pays. A 18 h, j’arrive à Capdenac où m’attendent Louise et Firmin ( Douziech, soeur et beau-frère d'Ernest ) qui m’apportent quelques gâteries. Voyage nocturne jusqu’à Orléans où nous arrivons au point du jour. A Juvisy à 8 h d’où on repart à 9 h. Interminable voyage jusqu’à Paris où nous arrivons à 11 h. Quelques achats en face de la gare.
Départ à 13 h. Arrivée à Damery à 18 h 30. Je retrouve mon bataillon à Boursault.  Rien de nouveau.






Suite du récit : Entrée au 6e Bataillon.

 
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